Pourquoi il faut parfois commencer par la fin : la leçon de Grave de Julia Ducournau

Et si c’était la fin d’un récit qui en révélait les véritables intentions ?

En storytelling comme en cinéma, partir de la fin, c’est souvent revenir à l’essentiel. Ce qui est nécessaire, ce qui est inévitable, ce qui laisse des traces.


🎬 Grave (2016), de Julia Ducournau

Justine, 16 ans, entre à l’école vétérinaire. Issue d’une famille strictement végétarienne, elle se retrouve confrontée à un bizutage qui l’oblige à manger de la viande crue pour la première fois. Ce déclencheur apparemment anodin va révéler une part d’elle-même qu’elle ne soupçonnait pas : un appétit sauvage, irrésistible… et profondément dérangeant.
À mi-chemin entre le film de genre et le récit initiatique, Grave explore la mutation, le désir, la lignée et la perte de contrôle — avec une précision chirurgicale.


🌱 Introduction : la fin justifie les moyens – vraiment ?

Dans l’enseignement du storytelling, on insiste souvent sur la structure classique : début, milieu, fin. Mais une lecture plus fine, plus intuitive, plus profonde, révèle une vérité moins scolaire : la fin précède tout.

Pas dans la chronologie.
Dans la nécessité.

C’est ce que démontre brillamment Julia Ducournau dans Grave, film initiatique, organique, brutal — mais aussi chirurgicalement structuré.

Dans cet article, je reviens sur une approche que je développe en formation et en accompagnement :
👉 Comment une fin inévitable peut nous aider à comprendre, écrire et incarner toute la trajectoire d’un récit — personnel ou fictionnel.


🎬 1. Pourquoi partir de la fin peut tout changer ?

Un bon récit n’est pas linéaire. Il est tendu vers un point d’aboutissement.
C’est cette tension qui lui donne son énergie.
Et quand on connaît la fin — ou quand on la pressent — alors tout devient lisible autrement.

Ce que permet une fin bien pensée :

  • Déduire les étapes nécessaires pour y parvenir
  • Choisir les révélations avec justesse
  • Créer des effets de relecture puissants
  • Donner un sens profond à l’ensemble du récit

Commencer par la fin, c’est accepter que ce n’est pas ce qui arrive qui compte, mais comment on y arrive.


🧩 2. Grave, ou comment une fin éclaire tout le récit

✂️ Spoiler alert

La dernière scène du film révèle que le cannibalisme de Justine n’est ni une déviance ni un accident. C’est un héritage familial. Sa mère est comme elle. Son père le sait. Rien de tout cela n’est une surprise pour lui.

👉 Tout le récit, jusque-là perçu comme une crise individuelle, devient un passage rituel, une transmission inavouée, un éveil biologique autant que symbolique.

🔦 Ce que la fin éclaire :

  • La passivité des parents : désormais logique.
  • L’attitude de la sœur : désormais lisible.
  • La transformation de Justine : désormais nécessaire.

Ce n’est pas un twist. C’est une révélation-réactivation : tout était là depuis le début, il fallait juste le recadrer à la lumière de la dernière scène.


🧱 3. Remonter le récit à l’envers : une construction stratégique

En repartant de cette fin, on peut déduire les nécessités du récit, comme une sorte de dissection à rebours.
Et ça tombe bien : Grave est aussi un film de chair, de corps, de peau, d’intérieur exposé.

🗺️ Les éléments à poser dans le récit pour rendre la fin inévitable :

  • Des indices sur la lignée familiale
  • Une première transgression “accidentelle”
  • Une escalade symbolique (cheveux → peau → chair)
  • Une sœur en miroir inversé
  • Une solitude affective croissante
  • Des ruptures de ton : du naturalisme à l’hallucination

Chaque étape est un maillon, chaque rupture un symptôme. Le tout forme une logique intérieure qui ne pouvait qu’aboutir à cette scène finale.


🎭 4. Les personnages comme vecteurs de cette inéluctabilité

Grave fonctionne parce que ses personnages ne sont pas là pour décorer.
Ils portent la structure du récit.

Justine :

L’héroïne au départ « pure », végétarienne, candide. Son évolution n’est pas une chute : c’est une mutation. Le récit ne la punit pas : il la révèle.

La sœur :

Opposant, guide, reflet. Elle montre sans dire. Elle précède Justine sur le chemin. Elle l’a déjà vécu — mais ne l’a jamais digéré.

Les parents :

Absents, en retrait… parce qu’ils savent déjà. Ils incarnent le non-dit, le poids héréditaire. Le père est celui qui, dans la dernière scène, donne la clé du récit.


✨ 5. Ce qu’on peut en retenir

Que vous écriviez une fiction ou que vous travailliez votre propre récit personnel ou de marque, cette approche par la fin est un levier :

  • Pour construire une trajectoire cohérente
  • Pour infuser de la tension dramatique naturelle
  • Pour semer des indices porteurs de relecture
  • Pour créer une structure organique, fluide et riche

La fin n’est pas un arrêt. C’est un point d’émergence.


💡 Exercice à tester : construire à rebours

Prenez une idée de récit — personnel ou fictionnel.
Imaginez sa dernière scène.
Puis, sans chercher à « remplir », posez-vous ces questions :

  • Qu’est-ce qui doit l’avoir précédée pour qu’elle soit crédible ?
  • Que ressent le personnage à cet instant — et comment ce ressenti a-t-il été construit ?
  • Qu’est-ce que cette fin révèle vraiment sur le fond du récit ?

🚀 Conclusion : la fin comme point de départ

On croit souvent que le récit est un chemin vers la fin.
Mais certains récits naissent de leur fin.

C’est ce que Grave démontre avec une précision clinique : en partant d’une dernière scène chargée de sens, chaque étape du film devient non seulement logique, mais organique.

💭 Et vous, si vous partiez de votre dernière scène… que devriez-vous écrire, vivre ou transformer pour y arriver ?


👉 Envie d’explorer votre propre narration et de construire un storytelling aligné avec votre transformation ?
🌀 Découvrez The YOU Code, une méthode pour reprogrammer votre récit à tous les niveaux.

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *